Streets of Salvador in Black and White
Salvador, Bahia. Même après 6 mois ici, j'ai encore du mal à m'approcher de ceux que je croise. A moins que cette peur ne soit présente partout et que je ne sois pas encore bien habitué à l'endroit.Salvador a une identité particulière, je n'ai jamais ressenti cette énergie ailleurs. On dit de Salvador qu'elle est la plus grande ville africaine en dehors de l'Afrique. Le poids de l'histoire se ressent très fortement, particulièrement dans le quartier du Pelourinho où je passe le plus de temps à photographier. Le quartier tire son nom de la place du pilori, où les esclaves venus d'Afrique en bateau portugais étaient fouettés ou mis à mort.C'est maintenant un lieu de tourisme, temple du selfie ou d'Instagram avec ses murs colorés. On aurait du mal à imaginer cela dans d'autres lieux de mémoire, mais le Pelourinho est maintenant un quartier joyeux. C'est un lieu de rassemblement populaire, de fêtes religieuses, de regroupements d'écoles de Capoeira ou de percussions, un lieu de vie pour de nombreux artistes.Le rapport au temps des habitants de Bahia est lui aussi particulier. Le futur n'est pas pris en compte, le passé est mis de côté, seul le présent compte. Que fais-tu maintenant ? Pas demain, pas dans une semaine, pas dans un agenda, maintenant. Ce rapport au temps est une des merveilles de Bahia, et quel meilleur symbole que quelques instants capturés :
Candomblé à Salvador de Bahia
Un dimanche à Salvador, en nous promenant sur la petite presqu'île de Ponta de Humaita, j'ai été transporté par un rituel religieux Candomblé.Le Candomblé est une religion afro-brésilienne pratiquée au Brésil, mélange de catholicisme, de rites indigènes et de croyances africaines, cette religion consiste en un culte des orixás (prononcé « oricha »). En étudiant la culture de Salvador, le Candomblé est partout, particulièrement dans le remarquable travail du photographe et ethnologue Pierre Verger, qui définissait le Candomblé ainsi : « Le Candomblé est pour moi intéressant comme religion de l'exaltation de la personnalité. On peut y être véritablement comment on est, et non comme la société prétend que le citoyen fût. Pour les personnes qui ont envie de s'exprimer à travers leur inconscient, la transe est une possibilité que l'inconscient a pour se montrer. »Devant la petite église Nossa Senhora de Monte Serrat, un groupe intégralement vêtu de blanc semble prier sur l'embarcadère. Les membres de ce groupes les plus avancés ont les yeux fermés, le ressac de la marée haute leur recouvre les jambes jusqu'aux cuisses. Certaines personnes paraissent en retrait, ce sont en réalité les personnes les plus âgées qui cherchent un peu d'air sur le quai ou d'ombre sous le porche de l'église. Les nuages éparses ne cachent que partiellement les hautes températures du soleil de novembre.La scène parait hors du temps, je suis bien seul avec mes vêtements sombres et mon appareil, on m'accueille pourtant avec de larges sourires. Après quelques minutes une barque revient du large à la rame, en descend Marcelo qui était parti pour une offrande à "Iemanja", déesse des eaux de mer.Après être revenu à terre, il entre dans une transe étonnante, partagée successivement par les membres du groupes dans des embrassades rituelles douces mais intenses. La musique Candomblé commence devant le phare, les percussions accompagnent toute la scène.Une fois le rituel terminé, les glacières sont ouvertes, les bières et le déjeuner partagés dans une fête simple et joyeuse.