L’histoire de la photo la plus chère du monde (et de son auteur)

Quand l’art contemporain se penche sur les clichés les plus onéreux jamais vendus, le nom d’Andreas Gursky surgit inévitablement. Figure énigmatique qui transcende les frontières de la photographie traditionnelle, il est l’auteur de l’image qui a longtemps détenu le titre de « la photo la plus chère au monde ». Comment son œuvre a-t-elle acquis une telle aura ?

Avez-vous déjà vu la photo la plus chère du monde ? Savez-vous qui en est son auteur ? Que la réponse soit oui ou non, je vous invite à lever le voile, avec moi, sur l’originalité et la créativité de l'œuvre et de son artiste. Nous allons observer sa capacité à transcender les limites de la photo afin d’exploiter d’autres techniques de formes artistiques. Quand l’art contemporain se penche sur les clichés les plus onéreux jamais vendus, le nom d’Andreas Gursky surgit inévitablement. Figure énigmatique qui transcende les frontières de la photographie traditionnelle, il est l’auteur de l’image qui a longtemps détenu le titre de « la photo la plus chère au monde ». Comment son œuvre a-t-elle acquis une telle aura ? Qui se cache derrière ces photos ? Préparez-vous à être émerveillé par l'univers captivant d'Andreas Gursky, où le réel et l'imaginaire se mêlent dans un ballet visuel saisissant, offrant un regard unique sur notre monde moderne.

1- L’apprentissage d’Andreas Gürksy

Un pied dans la photographie depuis l’enfance

Andreas Gursky est né le 14 janvier 1955 en Allemagne de l’Est. À deux ans, sa famille décide de déménager à l’Ouest, à Düsseldorf. Ses parents étaient propriétaires d’un studio photo. Nous aurions pu penser que la photographie se révélerait être un choix de carrière évident pour l’artiste. Toutefois, celui-ci y a été opposé pendant de nombreuses années, n’envisageant absolument pas de reproduire le schéma familial. Le destin, parfois taquin, l’a dérouté pendant quelques années avant de le guider vers le chemin d’un avenir artistique extraordinaire.  

Andreas Gursky s’initie à la photographie à la Folkwangschule d’Essen. Il y apprendra le photojournalisme. Pendant ses études, il travaille comme chauffeur de taxi afin de subvenir à ses besoins. En 1980, après de vaines tentatives de trouver un emploi en qualité de reporter photographique, un ami lui suggère de s'inscrire à l’École des beaux-arts de Düsseldorf. Il y fera la rencontre déterminante des chasseurs d’images Hilla et Bernd Becher. Ils deviendront ses mentors. 

Ils sont tous deux renommés pour leurs tirages capturés en noir et blanc. Ils enseignent donc tout naturellement à leurs élèves leurs techniques de prise de vue. Toutefois, après un an, Andreas Gursky se distingue en faisant le choix audacieux de ne se consacrer qu’à la couleur. Sa décision marque le début d’une exploration artistique hors du commun.

« Je ne suis intéressé que par l’espèce humaine et son environnement » - Andreas Gürky

Gürsky se concentre d’abord sur des éléments du quotidien, spontanés. Sa première photo exhibée s’intitule : « La gazinière allumée ». Capturée en 1980, elle annonce le décalage de ses futures œuvres par rapport à celles proposées à cette époque. L’influence de ses professeurs et leur appétence pour les objets bruts se reflètent dans ses premiers travaux. 

C’est en 1987 qu’il présente sa première exposition en solo à l’aéroport de Düsseldorf. Son style unique sera révélé à travers des photographies capturées pendant quatre ans. Elles mettent en exergue des employés de sécurité dans des halls d’immeuble à travers toute l’Allemagne. 
Sa fascination pour le monde contemporain marque sa photographie. Il montre progressivement une ambiance urbaine et industrielle, saisissant des scènes captivantes où la répétition anonyme de l’expérience humaine moderne vient dévoiler toute sa complexité. La contrainte sociale qui pèse sur les personnes s’observe dans ses photos. La position de Gursky quant à son art est ferme :

« Je ne suis jamais intéressé par l’individu, mais par l’espèce humaine et son environnement ».

Son objectif est d’exposer une réalité à un moment donné et de laisser libre-court à l’interprétation de son spectateur.

2- Le photographe le plus minutieux et patient

Une fois décidé à se lancer dans la photographie et après avoir pris position sur sa manière d’exercer son art, Gursky a, petit à petit, affiné sa manière de travailler. Dans une société où la photographie se fige souvent dans la prise de vue instantanée, Andreas Gursky fait usage de patience et de minutie pour capturer des moments uniques, voire inexistants. Il observe le monde avec un regard large et captivant. Ses techniques pour nous l’exposer : un choix du sujet précis, des outils innovants, une mise en scène picturale et une production parcimonieuse.

Comment choisit-il ses sujets ?

Dans un premier temps, Andreas Gursky a commencé à photographier de manière très spontanée. Il a ensuite, petit à petit, pris le temps de choisir son sujet. Il étudie les différents lieux qui pourraient l’intéresser et s’y rend avec une idée précise de ce qu’il va shooter. 

Il vient explorer des thèmes qui dévoilent l’essence même de l’époque dans laquelle nous vivons en photographiant au-delà de l’évidence. Il met en lumière l’histoire de l’ère de la globalisation. Les clichés des échanges financiers planétaires en sont un exemple. D’ailleurs, cette série initiée par sa photographie emblématique de la Bourse de Tokyo en 1990, ne vous rappelle-t-elle pas vos livres de géographie ouverts au chapitre de la mondialisation ? 

Gursky brise les barrières en adoptant une perspective unique. Il se rend dans des endroits inaccessibles et les ouvre au grand public à travers ses images. 

Il indique avoir capturé de nombreuses photos, les stocker et ne les ressortir pour travailler dessus que des années plus tard, lorsqu’il décide d’en faire un sujet. 

Andreas Gursky, " Frankfurt ", 2007

Andreas Gursky, " Frankfurt ", 2007

Andreas Gursky, " Tokyo, stock exchange ", 1990

Andreas Gursky, " Tokyo, stock exchange ", 1990

Des outils innovants au service d’œuvres gigantesques

Dès ses débuts, Gürsky a été attiré par les grands formats. En effet, les dimensions monumentales confèrent de l’ampleur à ses photographies et permettent au spectateur de se plonger dans l’image. Au départ, il recomposait ses épreuves pour les agrandir et créer des panoramas étonnants. L’étendue de ses tirages et l’innovation que cela représentait ont donné une importance fondamentale à son travail. Ses impressions peuvent mesurer jusqu’à trois mètres de long. Dès les années 80, Gürsky produit des scènes tellement larges qu’elles ne peuvent être tirées que dans un laboratoire commercial. Grâce à ces dimensions, l’observateur qui se rapproche peut étudier le moindre détail que Gursky aura choisi avec attention. L’évolution du numérique l’a emmené plus loin dans son exploration artistique en ajoutant et supprimant des éléments, mais également en jouant avec la composition pour constituer des spectacles uniques reflétant sa propre vision du monde. Ses images défient alors les limites du réel et invitent le participant dans un univers à la fois familier et étrange. Sa maîtrise de l’outil lui permet de créer des images exceptionnellement nettes et précises. 

Sur la photographie « 99 Cent II », quand Gursky s’attèle à la retouche, il augmente la colorisation pour attirer le regard. Il ajoute un miroir au plafond afin de multiplier l’effet de répétition. Sur cette prise de vue, des allées ont également été greffées. Il vient ainsi nous offrir un spectacle qui n’existe pas réellement.

Andreas Gursky, “ 99 cent ”, 1999

Andreas Gursky, “ 99 cent ”, 1999

Parfois, ses montages alimentent une utopie que lui seul aperçoit. En 2015, avec « Review », il propose un cliché de quatre chanceliers allemands : Gerhard Schröder, Helmut Schmidt, Angela Merkel et Helmut Kohl. Ils observent la peinture de Barnett Newman’s « Vir Heroicus Sublimis ». Incroyable, mais faux. Cette prise de vue est composée de toute pièce par son auteur. Les quatre politiciens ne se sont jamais retrouvés ensemble à cet endroit. 

Gursky, avec les instruments en sa possession, joue avec la réalité et le reconstitue à sa guise. 

Andreas Gursky, " Review ", 2015

Andreas Gursky, " Review ", 2015

Au-delà de l’outil numérique, il a également décidé d’utiliser des grues ou encore des hélicoptères pour obtenir une perspective aérienne et de souligner l’immensité de nos environnements urbains et industriels. Pour exemple, « Madonna I » photographie de l’un des concerts de Madonna en 2001. 

Il capture la globalité des scènes et révèle des détails insoupçonnés invisibles à l’observateur du quotidien.

Andreas Gursky, " Madonna I ", 2001

Andreas Gursky, " Madonna I ", 2001

Mise en scène et gigantisme

Profondément influencé par sa passion et sa fascination pour la peinture, Gursky en utilise les techniques dans sa composition photographique. Si nous avons pu voir qu’il retouchait ses clichés, il planifie également le décor en le réfléchissant en amont et en faisant poser ses sujets. Comme un peintre, il les met en scène et leur demande de changer leur tenue par exemple. Il manipule le moindre ingrédient afin de laisser apparaître ce que lui souhaite montrer. 

Il retravaille ensuite l’image en composant et inventant des éléments qui n’existent pas. Si l’on récapitule, son procédé créatif est déroulé en plusieurs étapes : 

  • Le choix du sujet et la définition de ce qu’il veut en montrer 

  • La mise en scène de la prise de vue et sa capture 

  • La retouche photographique pour ajouter des éléments, mais également composer des œuvres plus grandes 

D’ailleurs, si le journaliste Eddy Frankel indique :

« La taille compte dans l’art. Il y a plusieurs centaines d’années, les seuls sujets autorisés à être peints très grands étaient des scènes de la Bible ou de l’Histoire. Gros signifiait important, cela signifiait spécial. ».

Nous pouvons nous demander si ce n’est justement pas l’objectif de Gursky : être spécial grâce à la dimension de ses images mais également par le point de vue omniscient qu’il utilise dans ses photographies. Il adopte une vision divine du monde. Sur « Paris, Montparnasse », par exemple, l’absence de cadre implique une possibilité de reproduction à l’infini. Dans ses œuvres, il ne se contente pas de simplement documenter la réalité, mais il en crée une à part entière.

Andreas Gursky, “ Paris, Montparnasse ”, 1993

Andreas Gursky, “ Paris, Montparnasse ”, 1993

Andreas Gursky, " Pyongyang I ", 2007

Andreas Gursky, " Pyongyang I ", 2007


8 photos par an

L’indépendance qu’Andreas Gursky a gagnée au cours de sa vie en vendant son art lui permet aujourd’hui de se concentrer sur la qualité plutôt que la quantité. Il ne diffuse qu’un nombre limité de clichés par an, environ 8. Cette création parcimonieuse témoigne de son approche méticuleuse et de sa quête de la perfection visuelle. Chaque photo est le fruit d’un long travail de recherche et de retouche. Il ne se contente pas de capturer, mais conçoit des compositions puissantes résistantes à l’épreuve du temps. 

Ne s’agirait-il pas d’une critique implicite de la production de masse ? En exposant moins, Gursky met l’accent sur l’importance de l’expression artistique authentique et réfléchie. Dans la précision de ses images, il force l’observateur à s’attarder et à analyser le moindre des détails s’il veut saisir l’essence de la photographie. 

3- Pourquoi l’œuvre d’Andreas Gürsky est originale ?

Inspiré par la société de consommation

Son travail est marqué par l’abondance de détails, qui capturent l’essence de la globalisation et de la société de consommation. Il souligne la répétition qui caractérise ces univers modernes qui le fascinent. Il nous offre un regard nouveau et une prise de recul sur des images familières. La redondance met aussi en lumière la monotonie et la routine dans lesquelles les humains semblent parfois piégés. Sa vision force le spectateur à plonger dans des scènes d’une puissance visuelle saisissante. Toutefois, il ne cherche pas à exprimer des opinions politiques à travers ses photos, mais plutôt à rendre compte de la réalité telle qu’elle est, sans jugement ni critiques. Il nous laisse le soin, à nous, spectateurs, d’interpréter et de réfléchir sur ces scènes.

Andreas Gursky, « Bergwerk Ost », 2008.

Andreas Gursky, « Bergwerk Ost », 2008.

Il intègre la musique dans ses expositions

Au-delà de la photographie traditionnelle, Andreas Gursky explore de nouvelles voies créatives en intégrant des éléments sonores à certaines de ses expositions. Pour « Not Abstract II » en 2016, organisée à la Gagosian Gallery de New York, l’artiste a invité le DJ et producteur Richie Hawtin à composer une bande sonore qui accompagnerait ses clichés. Avec cet ajout, Gursky souhaitait encourager le public à prendre le temps de s’immerger davantage dans l’univers de ses images. 

Gursky, passionné par la techno, en a même fait un sujet de travail. « Dance Valley » en est un exemple. À juste titre, dans son interview pour le magazine Vice, Laura Käding, journaliste, n’hésite pas à lui faire remarquer que ses photographies, comme la musique électronique, comportent des séquences, des répétitions et des fréquences. 

Bien que Gursky soit principalement connu pour ses impressions de grandes tailles, il ne se limite pas à ce format. Il a également exploré des séries de tirages de plus petite dimension, comme celle sur les super héros. Cette dernière témoigne de sa créativité sans limites et de sa capacité à expérimenter au-delà des conventions.

Andreas Gursky, SH III, 2014

Andreas Gursky, “ SH III ”, 2014

4- Voici, la photo la plus chère du monde

C’est ce parcours avec les différentes influences qui s’y sont greffées qui ont amené à l’édition de la photographie la plus chère au monde : « Rhin II ». Capturée en 1999, cette image minimaliste expose le Rhin dans une composition épurée et sans présence humaine. La force de la nature, tranquille et majestueuse, y est mise en avant. 

Elle est le résultat de nombreuses heures de travail, pendant lesquelles Gursky s’est attaché à effacer toute trace de l’homme. En effet, comme évoqué précédemment, il a souhaité que le Rhin représente le calme et l’infini : mission réussie ! En 2011, pour cette image, il a obtenu 4.3 millions de dollars lors d’ enchères. Elle a été jusqu’en 2022 la photographie la plus chère au monde. 

Si elle a été vendue à ce prix, c’est parce qu’il n’y en a que 6 exemplaires. Celle-ci en étant le plus grand. Son unicité la rend rare et coûteuse. Par ailleurs, sur les 5 autres tirages, 4 sont exposés dans des musées, rendant ainsi inaccessible l’acquisition de cette photographie.

Andreas Gursky, “ Rhin II ”, 1999

Andreas Gursky, “ Rhin II ”, 1999

Notre fascinante aventure dans le monde artistique d’Andreas Gursky touche à sa fin. Son regard sur le monde, sa vision, son obsession pour les détails et sa capacité à capturer des scènes puissantes en font un photographe hors du commun. « Rhin II » incarne non seulement la vision artistique de Gursky, mais a également influencé l’art contemporain en remodelant la manière dont nous percevons le monde qui nous entoure. L’artiste et son œuvre ont transformé l’art contemporain en élargissant les horizons de la photographie, en remettant en question les conventions artistiques et en soulevant des débats cruciaux sur la société moderne, la globalisation et la surconsommation.  

Aujourd’hui, la qualité du travail d’Andreas Gursky est connue de tous les collectionneurs. La vente de ses clichés lui a permis de diminuer les voyages et de ne plus avoir à systématiquement exposer son travail. En plus de son métier, il est également professeur à l’académie des Beaux-Arts de Düsseldorf. Il partage un studio avec d’autres confrères photographes. Sera-t-il, comme l’ont été Hilla et Bernd Becher, le mentor de l’auteur ou de l’autrice de la nouvelle image la plus chère au monde ?

Références :
https://www.ericcanto.com/andreas-gursky-photographe/
https://www.artmajeur.com/fr/magazine/8-portraits-d-artistes/andreas-gursky-capturer-l-echelle-monumentale-du-monde-moderne/333853
https://www.independent.co.uk/arts-entertainment/art/features/andreas-gursky-a-god-s-eye-view-of-the-world-9322396.html
https://www.vice.com/en/article/78egzy/exclusive-andreas-gursky-richie-hawtin-nicht-abstract
https://totallyhistory.com/andreas-gursky/
https://gagosian.com/quarterly/2022/05/05/interview-andreas-gursky-max-dax/
https://www.timeout.com/london/art/andreas-gursky-2

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5 conseils aux photographes émergents avec Martin Parr

Je suis un admirateur de Martin Parr, et j’ai trouvé dans cette récente vidéo le maximum de sagesse que l’on puisse condenser en 3 minutes et 7 secondes. Martin Parr y développe ses principaux conseils à des photographes émergents ou qui aspirent à devenir professionnels, et j’ai décidé de la traduire sans autre commentaire pour vous en proposer sa substantifique moëlle.

Vous allez probablement échouer

“À moins que vous n’ayez une obsession, au point que ce soit presque une maladie, vous ne réussirez pas.

Si vous n'avez pas cette obsession, trouvez un travail, dans un bar où ce que vous voulez. Ou alors, vous pouvez garder la photographie dans votre vie, mais il sera très improbable de gagner sa vie avec.”

- Martin Parr

Trouvez une bonne connection avec le monde qui vous entoure

“C’est la qualité de cette connection qui est vraiment importante. Vous devez trouver un sujet sur lequel vous allez travailler, un sujet qui vous tient à cœur et trouver un moyen de l’exprimer et d’en parler.

En espérant que cela vous donne le momentum de manière à ce que vous obteniez de bons travaux. C’est votre responsabilité de trouver le bon sujet.”

- Martin Parr

Apprenez l’histoire de la photographie

Vous devez beaucoup observer et apprendre d’autres photographes. Vous devez apprendre l’histoire de la photographie et trouver des enseignements dans ce que ces photographes ont accompli. Puis vous pourrez appliquer cela à votre propre travail.

En faisant ça, vous pourriez avoir l’opportunité rare de développer votre propre voix ou style et vous pourriez devenir un(e) photographe avec sa voix particulière.

- Martin Parr

Identifiez votre style

La plupart des gens échouent parce que ça a l’air extrêmement simple. Vous prenez un appareil, vous n’avez même plus besoin de travailler votre exposition, et juste en faisant ça beaucoup pensent qu’ils ont du mérite. Mais on doit être capable de voir une de vos photos et de savoir tout de suite que c’est VOUS qui l’avez prise et pas quelqu’un d’autre.

- Martin Parr

Les bonnes photos sont (très) rares

Quand on est dehors avec un appareil, on espère que c’est un de ces jours où l’on prend une de ces photos exceptionnelles, mais ça n’arrive pas souvent. La plupart du temps, on est déçu, mais il faut être prêt pour cette possibilité, pour ce moment où une bonne photo va apparaître. Mais pour arriver à ça, il faut accepter de prendre beaucoup de mauvaises photos. On a beaucoup plus de mauvaises photos que de bonnes photos.

Parfois on se déplace, on se documente et on est là où il faut. Mais le problème en photographie c’est qu’il faut être là avant que l’événement n’arrive. Vous ne pouvez pas être là après que ça arrive.

Et il faut continuer à sortir, jour après jour, et prendre beaucoup de mauvaises photos avec l’obsession de trouver ces photos exceptionnelles. On a probablement pas plus de 10 photos exceptionnelles dans une année, et c’est déjà réussi d’en avoir 10, c’est incroyable. Il y a beaucoup d’années où Martin Parr dit n’avoir qu’une seule bonne photo.

C’est difficile de définir ce que constitue une bonne photo, mais quand on en voit une on le sait.

- Martin Parr

Photos Martin Parr / Magnum Photos



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Brûler les ponts

Aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours voulu être photographe professionnel pour une seule raison : avoir la possibilité de marcher et photographier pour moi, où que je sois. J’aime photographier des craquelures sur le béton, une lueur dans un nuage, un bout de papier ou un pot de peinture qui a une drôle de forme. J’aime photographier les gens, tous les gens. Mais parce que je n’ai qu’une vie, je dois choisir. Souvent, je me laisse porter par une intuition totale, sans aucune sophistication intellectuelle. Je vais parler à tout le monde, et de préférence n’importe qui.

Bien sûr, ce que je viens de décrire est tout sauf la photographie professionnelle. Mais si ma vie professionnelle m’empêchait un jour de prendre les photos que j’aime, j’arrêterais immédiatement. J’ai eu la chance de pouvoir atteindre certains de mes rêves, notamment me présenter comme “Photographe de voyage” en travaillant essentiellement avec des agences ou des magazines de voyages. Au delà du plaisir mésestimé de rendre jaloux quelques rageux, accomplir ce type de rêve est tout sauf un chemin droit, lisse et bordé de petits anges tous nus qui chantent vos louanges en Indou. C’est dur, émotionnellement choquant, souvent tragique. Et pourtant, non seulement je recommencerais sans aucune hésitation, mais en plus je le conseille à ceux qui sont prêts à l’entendre.

Je ne crois pas qu’il faille suivre ses rêves aveuglément, bien au contraire. Mais si vous découvrez quelque chose qui vous accomplit pleinement, je suis convaincu qu’il n’existe qu’un seul moyen d’atteindre ses rêves : brûler les ponts qui vous y mènent. Je m’explique.

Premier conseil, qui peut-être vous explosera le cerveau comme moi quand je l’ai réalisé : un objectif, c’est un rêve avec une date. Je vais vous faire une confidence, je me suis longtemps cru incapable d’être indépendant, de travailler pour moi ou chez moi. Je me disais que ça n’était tout simplement pas mon caractère. Ce qui m’a sauvé : être une tête de mule. Et brûler des ponts. J’y viens.

Si vous voulez atteindre vos rêves, notez-les tous sur un carnet en les classant par catégories : développement personnel, vie professionnelle, loisirs (les voyages ou jouets viennent ici), et enfin comment vous pouvez aider un peu les autres. Reprenez vos quatre pages de notes, et mettez une date raisonnable pour réaliser chaque rêve. Choisissez-en un seul par catégorie pour l’année à venir. Et voilà ! Ces rêves sont maintenant des objectifs à atteindre, pour lesquels je vous conseille d’inscrire instantanément le plan d’actions qui doit vous y mener.

D’après Ralph Waldo Emerson :” à partir du moment où vous prenez une décision, l’univers va conspirer pour que cela se réalise“. Mais comment est-ce que vous pouvez effectivement prendre une décision qui vous mette sur ce chemin ? En brûlant les ponts, c’est à dire en étant absolument et totalement investi dans votre décision. Un autre penseur nous éclaire ici, Robert Brault, quand il dit : “ce qui nous empêche d’atteindre nos objectifs majeurs, c’est un chemin plus facile vers un objectif mineur”.

Brûler les ponts, c’est s’empêcher de faire demi-tour et être obligé de réussir. Alors évidemment, vous n’êtes pas forcé de suivre mon exemple quand je démissionnais de mon dernier job, sans chômage et sans client. Vous n’êtes pas obligé non plus de sortir un livre tous les ans quoi qu’il en coûte, comme je m’y suis résolu il y a maintenant trois ans. Mais vous pouvez vous investir tellement dans votre décision, dans la photographie ou non, pour atteindre ce point de non-retour que connaissent tous les entrepreneurs et qu’ignorent ceux qui ne font qu’en rêver.

Bien sûr, mon programme de mentorat a aussi cette fonction : vous mettre dans une position d’investissement personnel qui va tout accélérer. J’y développe aussi des méthodes qui doivent vous faire grandir tout en gardant une photographie qui vous soit personnelle, intime, unique.

Parce que je suis convaincu qu’on ne peut s’épanouir en photographie qu’en gardant ce qui en fait la flamme pour nous, et rien que pour nous. Rien ne remplace mon plaisir de sortir de chez moi et d’aller faire des photos dans la rue. Même si cela fait plusieurs mois que je passe tout mon temps devant mon ordinateur pour préparer des voyages, des ateliers et des formations. Je suis en train de brûler mes ponts, pour pouvoir continuer à vivre mes rêves.

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L’homme orchestre

Un photographe professionnel est un homme orchestre. Quelle que soit sa spécialité, les genres pratiqués ou les clients qui lui font confiance. C’est vrai en 2021, mais c’était certainement le cas depuis les débuts de la photographie, en tout cas pour des photographes indépendants.

Il faut être capable de mener une activité d’entreprise seul en gardant une démarche personnelle, puisque elle seule permet de se différencier, ou simplement d’avoir des photographies à montrer.

Depuis 10 ans, les métiers que j’ai occupé sont nombreux :

  • Photographe de voyage, de rue, de villes, d’événements, de voitures, de mariages, culinaire, portraitiste, journaliste et combien d’autres…

  • Écrivain, journaliste, blogueur quand j’ai besoin d’écrire pour moi ou pour les autres.

  • Community Manager, ce mot fourre-tout pour dire qu’il faut savoir créer un site web et développer une présence, voire une communauté sur les réseaux 365 jours par an.

  • Entrepreneur, commercial, comptable, mais surtout stratège ou marketeur (quel horrible mot) quand il s’agit d’atteindre des objectifs de chiffre d’affaires.

  • Et aussi, travailler avec des galeries, monter des expos, développer des projets avec des startups (Artpoint) ou des grosses machines (Yellow Korner), éditer des livres ou des magazines.

  • Guide de voyage dans une dizaine de pays.

  • Enseigner, écrire des cours, développer la créativité chez d’autres et accompagner le développement personnel en photographie, amateure ou professionnelle.

Jamais je n’aurais imaginé être capable de faire tout cela, JAMAIS. Tout ce que je voulais, c’était faire des photos et espérer que certains soient assez fous pour m’en commander. J’ai réalisé très tard dans ma vie que c’était tout ce que je voulais faire, et rien d’autre. Dix ans plus tard, j’ai toujours mon appareil à portée de main et le même plaisir d’essayer de voir des belles choses ou de les montrer quand une photo est réussie.

Ce que cette liste ne dit pas, c’est d’abord que ces métiers ne se font pas tous en même temps, dans la même année ce serait impossible. Ensuite, ce qu’elle ne montre pas c’est l’aide que j’ai pu trouver chez d’autres photographes. Dans des livres souvent, et dans des discussions parfois. J’ai eu la chance de passer du temps avec beaucoup de photographes qui ont réussi, grâce à eux je me suis forgé des convictions et ai trouvé des méthodes que j’ai pu adapter à ma pratique ou à mes besoins.

On a toujours besoin d’un plus grand que soi, c’est ce que décrit très bien Robert Greene dans le livre “Mastery - Atteindre l’excellence” : pour progresser, il faut absolument s’appuyer sur d’autres. Encore cette année, j’ai choisi d’être aidé pour le projet développé pendant ma résidence artistique à Port-Fréjus, pour son écriture et pour l’édition du livre qui sortira l’année prochaine.

L’année dernière, je profitais du premier confinement pour demander une lecture de portfolio à un photographe que j’admire absolument. Cette lecture de portfolio m’a coûté cher, mais je n’en regrette pas un seul centime, elle a été l’occasion d’une prise de conscience qui m’a fait franchir une nouvelle étape.

Et depuis cette année, j’ai la chance d’avoir pu me mettre dans la peau de celui qui enseigne, de celui qui aide d’autres photographes à progresser. Quand je proposais mon programme de Mentorat, j’allais dans l’inconnu. Je n’avais jamais eu ce rôle et j’espérais que tout le monde puisse progresser de manière notable. Je peux maintenant dire que tous les participants ont progressé, d’abord dans leur photographie. Pour certains, leur carrière à décollé grâce aux projets développés pendant ce mentorat.

Je sais que ce programme peut faire une différence.

Et si vous êtes curieux, vous pouvez commencer par une lecture de votre portfolio.

Paris - Aout 2021 - Photo Genaro Bardy

Paris - Août 2021 - Photo Genaro Bardy

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